Inégalités et discrimination: les migrants pendant et après la pandémie de Covid

Inequalities and discrimination: migrants during and after the Covid pandemic

Fiorella Giacalone

Dipartimento di Scienze Politiche, Università degli studi di Perugia


Indice

Introduction

Le racisme institutionnel

Les stratégies juridiques et sécuritaires

La pandemie de Covid-19

Références bibliographiques


Abstract

The text reflects on the forms of discrimination that the concept of nation, with the idea of a hypothetical national purity, creates towards foreigners and non-citizens. Institutional racism arises as a legal-social sphere that prevents the foreigner from obtaining social and political rights. This is why anthropologists continue to deconstruct the discursive practices that define an essentialist vision of culture tending to create a reification of differences. The Covid-19 pandemic has worsened the situation of migrants, especially in terms of employment, increasing forms of inequality.

Keyswords: inequalities, migrants, racism, political rights.


Introduction

Les migrations sont un phénomène complexe, qui touche tant celles et ceux qui partent [Sayad 2002] (le choix d’émigrer, les difficultés du voyage, les attentes) que celles et ceux qui les accueillent, et la manière dont cet accueil est réalisé. Les attentes de celles et ceux qui partent dépassent souvent ce qu’ils trouvent en arrivant dans les lieux d’accueil. Bien qu’il s’agisse d’un phénomène mondial, c’est surtout localement, dans les différentes régions et villes où sont gérés les flux migratoires qu’il se manifeste. Les migrations sont conditionnées par les contextes politiques, par les guerres (pensons à la Syrie, à l’Afghanistan, et maintenant à l’Ukraine), par les changements climatiques, par les inégalités flagrantes entre pays riches et nations pauvres.

Les migrations ont donc un impact réel, tant sur les individus qui se déplacent, que sur les dynamiques économiques mondiales et locales et sur la gestion des personnes issues de situations et de conditions différentes (centres, personnes, ressources économiques). Il s’agit d’une rencontre entre des êtres différents, souvent marqués par des variables importantes (religions, cultures, systèmes de pensée, relations de genre) qui se font jour lors de l’accueil des migrants1.

Ce phénomène complexe est désormais devenu structurel et concernera de plus en plus le continent européen, notamment pour des raisons démographiques et économiques. Si certains pays en ont assuré une gestion continue (Allemagne, France, Suède, Espagne, Italie), avec la guerre en Ukraine, c’est l’Europe de l’Est qui se trouve désormais directement touchée à son tour: la Pologne principalement, mais aussi la Hongrie et la Roumanie, pays qui ont refusé pendant des années la redistribution des migrants qui débarquaient sur les côtes italiennes et espagnoles, (demandée par la Commission européenne)2.

On voit donc combien les migrations ont investi les connaissances des anthropologues européens, dans une réflexion à la fois théorique (inégalités structurelles et économiques) et politique (identité nationale, dynamiques entre les partis), mais aussi de gestion (formes d’accueil, statut juridique du migrant) et culturelle (pluralisme religieux, différences culturelles, rapports de genre). Les sociétés multiculturelles sont face à un grand défi: comment concilier la démocratie, la protection sociale, les droits sociaux et politiques pour des sujets qui proviennent souvent de pays où ces droits n’existent pas. Les anthropologues ont mis en exergue la complexité de la construction sociale des migrations, qui tend à représenter ces dernières davantage comme un problème que comme une ressource (humaine, culturelle, de travail). Ils ont notamment étudié les pratiques quotidiennes par le biais d’ethnographies, et suscité une réflexion sur les différents modèles de citoyenneté dans les pays européens, ainsi que sur les politiques sociales mises en œuvre comme autant de voies d’inclusion sociale3.

Malheureusement, nous avons mis en place en Europe des mécanismes bureaucratiques qui entravent l’intégration juridique et sociale des migrants, en opérant une distinction entre les «migrants», dont les droits sont difficiles à acquérir, et les «citoyens», qui disposent de ces droits par leur naissance (ressortissants nationaux). En fait, la distinction entre migrants et citoyens crée en soi une forme d’exclusion, ou d’intégration partielle, une différence entre les «vrais citoyens» et les «nouveaux citoyens» auxquels nous «concédons» la citoyenneté après un processus long et semé d’embûches.

Un exemple de diversité parmi les nations européennes concerne la possibilité d’avoir la citoyenneté pour les «deuxièmes générations». L’Italie est placée à la14éme place, avec la Grèce, si l’on exclut les pays d’Europe de l’Est. Aux premières places se trouvent le Portugal, la Suède, l’Irlande, le Luxembourg, la Finlande. Quant aux formes juridiques, en Belgique, en Allemagne, en Irlande et au Portugal, il existe le «ius modéré», qui permet l’acquisition de la nationalité à la naissance, si les parents résident dans le pays depuis un certain nombre d’années. En France, au Luxembourg, en Hollande, en Espagne, il existe le «double ius soli», qui prévoit la nationalité à la naissance si au moins un des parents est né dans le pays d’accueil. La Grèce applique le double «ius soli modéré», qui exige la résidence permanente en plus de la naissance d’au moins un des parents4.

Agamben aussi, lorsqu’il parle de la «biopolitique de l’État moderne», nous rappelle que les droits de l’homme [ONU 1948] qui sont, par nature, universels, ont été supplantés par les droits du citoyen et sont donc liés à l’appartenance territoriale. Dans cet horizon de définition, l’étranger crée des conflits dans l’ordre social et étatique, interrompant la continuité entre l’homme et le citoyen: il en découle «la séparation entre les droits de l’homme et ceux du citoyen» [G. Agamben 1998, 141-147; Aime 2004, 97-98; Ong 2005]. Sayad, déjà dans son texte, réfléchissait sur l’importance du concept d’Etat pour séparer les «nationaux» des «non-nationaux», ceux qui possèdent une nationalité (culture, religion, identité) de ceux qui n’en ont pas.

L’immigration représente la limite de l’État national, le limite qui montre ce qu’il est intrinsèquement, sa vérité fondamentale. L’État, par sa nature même, discrimine et fournit ainsi à l’avance tous les critères appropriés nécessaires pour procéder à la discrimination, sans laquelle il n’y a pas d’État national [...] Il semble plus impératif, et donc plus prescriptif, dans le cas de l’État national républicain, dans l’État qui aspire à une totale homogénéité nationale, c’est-à-dire à une homogénéité à tous les niveaux: politique, social, économique, culturel (surtout linguistique et religieux) [Sayad 2002, 369].

Ainsi l’étranger perturbe l’ordre national, brouille la frontière entre national et non-national, l’idée d’une «pureté ou perfection mythique» comme fondement même de l’identité nationale. L’intégrisme national est remis en cause par les migrants, qui semblent troubler l’intégrité de l’ordre social, tout en soulignant l’incomplétude de la nation.

Le racisme institutionnel

Si les dispositions du droit européen témoignent de l’attention portée par les États membres aux questions relatives aux droits fondamentaux des personnes, aux principes d’équité et d’égalité de traitement, elles montrent également à quel point ces questions sont devenues cruciales pour l’accueil des nouveaux citoyens, qui sont souvent privés de leurs droits civils et politiques. Indirectement, le besoin de nouvelles directives met en évidence les inégalités de traitement entre les citoyens (autochtones) et les immigrés, et souvent aussi entre les hommes et les femmes, des inégalités si marquées qu’il est nécessaire de les définir, de les préciser, de les sanctionner et de les punir. L’Europe apparaît comme un continent où la discrimination fait de plus en plus l’objet d’une réflexion, non seulement sur le plan éthique et social, mais également au niveau juridique et culturel5. Chaque nouvelle déclaration met en évidence la nécessité d’une plus grande protection des sujets vulnérables et montre plus clairement à quel point les formes de discrimination et d’incitation à la haine raciale augmentent: plus la société apparaît intolérante, plus les protections sont mises en place. Il s’agit de ce que l’on appelle le «racisme institutionnel», et j’entends par là

l’ensemble des lois, coutumes et pratiques en vigueur qui reflètent et produisent systématiquement les inégalités de la société [...] Si ce racisme n’est pas reconnu et qu’un plan pour l’éliminer n’est pas mis en place, il peut se frayer un chemin dans l’éthos ou la culture d’une organisation. C’est un mal corrosif [Mac Pherson 1999, 6.30, 34].

Pour identifier ou établir l’existence d’un racisme institutionnel, il convient d’analyser les effets que produisent les institutions: si une loi ou les pratiques sociales perpétuent la discrimination à l’égard des minorités (ethniques, religieuses, sexuelles), on a alors affaire à un racisme lié à des mécanismes politico-institutionnels. Les discriminations peuvent se manifester sans intention consciente (racisme implicite) mais donner lieu à des actes parfois très graves. Ce type de racisme met en exergue les attitudes discriminatoires ou préjudiciables des agents des services publics, juges et policiers compris. C’est une forme de racisme institutionnel puisqu’il s’agit de personnes qui assurent un service public [Bartoli 2012, 15].

Les relations avec les institutions sont cruciales, tout comme l’aspect lié au travail et la dimension publique; l’élément le plus préoccupant concerne les médias et notamment les réseaux sociaux, qui semblent être devenus un réservoir de racisme, non seulement verbal, mais également lié à des comportements spécifiques [Ziccardi 2016].

Cette orientation pourrait laisser présager un passage de la rhétorique euphémistique du discours xénophobe politiquement correct à une confrontation réelle, qui trouverait dans les segments de la population les plus soumis au malaise social de nouveaux acteurs directs de conflit social. Une partie de ces tensions pourrait être canalisée dans la recherche de boucs émissaires faciles, identifiant l’étranger comme la source des difficultés économiques contingentes et comme celui qui, en cas de difficulté, doit céder la place au citoyen autochtone, seul détenteur légitime de droits. Parallèlement, le faible nombre de plaintes directes de la part des victimes présumées de discriminations (21,1%) montre, chez les individus ayant un statut juridique plus faible, comme les citoyens étrangers, une croissance de leur résignation à subir de tels actes, convaincus qu’ils sont de représenter le maillon faible d’une chaîne économique et de travail dont ils seraient les premières victimes en cas de dénonciation d’une discrimination subie [Vulpiani 2015, 166].

La discrimination, à l’instar du racisme institutionnel, consiste à «ne pas fournir un service approprié et professionnel à des personnes en raison de la couleur de leur peau, de leur culture ou de leur origine ethnique. Elle peut être vue ou détectée dans des processus, des attitudes et des comportements qui reflètent une discrimination à travers des préjugés inconscients, de l’ignorance, de l’inattention et des stéréotypes racistes qui désavantagent les personnes appartenant à des minorités ethniques» [Mac Pherson 1999, 6.34]. Il s’agit de traitements différents dans des situations apparemment similaires ou égales, sans qu’il y ait de justifications de l’action discriminatoire effectuée.

Il semble évident qu’en Italie (mais aussi dans d’autres pays européens), la condition du migrant, non seulement en tant qu’étranger, mais également parce qu’il est culturellement différent, doive être soumise à des contraintes et des sanctions réglementaires pour pouvoir accéder aux droits sociaux dont jouissent les citoyens. L’accentuation de la diversité culturelle sert à masquer les asymétries de pouvoir, le fait de placer la question de l’identité nationale au centre sert à souligner la différence culturelle ou religieuse en tant que problème social, afin de dissimuler les discriminations en cours et le démantèlement de la protection sociale des étrangers, qui doit demeurer un bien public des Italiens. La discrimination institutionnelle sert à souligner les différences, à séparer les communautés et à distinguer les sujets sur la base des droits dont ils sont titulaires. Placer des frontières (administratives, bureaucratiques, juridiques) sur le parcours de l’accès aux droits sert à affirmer, à la fois directement (discrimination explicite) et indirectement (discrimination cachée) que l’autre appartient à une diversité qui confine à la déviance, contre laquelle il faut placer des règles de sécurité masquées en pratiques légales, et donc légitimes. C’est pourquoi les anthropologues continuent à déconstruire les pratiques discursives qui définissent une vision essentialiste de la culture tendant à créer une réification des différences: travailler contre l’essentialisme culturel est devenu une pratique quotidienne des chercheurs qui étudient le vaste champ d’une anthropologie publique qui dialogue avec les institutions, afin d’en démasquer la construction des frontières et des différences.

En France, des auteurs tels que Fassin [2006; 2010] et Augier [2020] ont souligné les difficultés de l’accueil et les dynamiques de biopolitique dans la gestion des présences. En Italie, des bibliothèques entières rassemblent les nombreuses recherches réalisées sur ce sujet, depuis les badanti (auxiliaires de vie) jusqu’à l’exploitation des journaliers noirs dans les campagnes du sud de l’Italie, en passant par la gestion des centres d’accueil extraordinaire (CAS) et dans les systèmes d’accueil et d’intégration (SAI) des migrants accueillis [Colasanto, Ambrosini 1993; Giacalone 2016, 2021; Sorgoni 2011; Pinelli 2011; Parisi 2020; Riccio 2014; Tarabusi 2014; Altin, Sanò 2017; Vietti 2019]. Les jeunes chercheurs et les doctorants, notamment, mènent souvent des recherches sur les dynamiques d’accueil des réfugiés et des demandeurs d’asile, ou sur les formes de marginalité sociale que la migration implique. Il suffit de parcourir les revues d’anthropologie pour en saisir la portée et la réflexion scientifique [Vacchiano 2011; Zanini 2017; Cammelli 2017; Schmidt, Palutan 2020].

Malgré les nombreuses formes de discrimination, il existe des expériences intéressantes d’accueil, tant sous des formes artistiques (danse, théâtre), que sous diverses formes d’échange, comme dans l’expérience de l’association Baobab à Rome [Schmidt, Palutan 2020] et sous forme narrative dans un centre d’accueil [Cammelli 2017] ou par des pratiques religieuses [Parisi 2020; Giacalone 2021].

À Pérouse, depuis plus de vingt ans, il y a l’expérience de Human Beings, fondée par le metteur en scène Danilo Cremonte, qui a créé un laboratoire théâtral dans lequel Italiens et demandeurs d’asile se rencontrent et agissent, comme un espace physique et émotionnel, dans expérimenter les uns avec les autres et apprendre à se faire confiance.

Le théâtre des Human Beings (Théâtre Refuge) est une tentative et une recherche d’émotions, à travers les liens qui se créent entre les acteurs, puisant dans la vie et les expériences de personnes, qui n’ont généralement aucune formation théâtrale. Les personnes qui font cet atelier apportent leur histoire et leur humanité. Le laboratoire est vu comme une sorte de refuge dynamique, non pas un endroit où se cacher du monde extérieur, mais un endroit où se reposer et repartir. Il ressemble à un refuge de montagne où l’on s’arrête à mi-chemin avant de s’attaquer au sommet de la montagne ou d’effectuer d’autres itinéraires. «Parfois, vous venez au refuge en groupe. Avec des compagnons d’escalade avec qui il était convenu de tenter l’ascension [les demandeurs d’asile], mais dans le refuge ils rencontreront d’autres alpinistes avec qui contes, projets et histoires de montagne vont s’entremêler et se mêler devant la chaleur du feu […] Tout le monde s’attaque volontairement à une entreprise ensemble et tout le monde a besoin d’une base sûre pour démarrer et revenir» [De Grisogono 2015, 143]. Le laboratoire est donc une rencontre, (un refuge), un processus, un parcours, où le jeune immigré ne sera pas vu comme un demandeur d’asile, mais comme une personne, avec son histoire, avec son expression corporelle spécifique. C’est aussi un lieu de conflit, où différentes identités et tensions relationnelles sont vécues6.

Les stratégies juridiques et sécuritaires

Bauman appelle la société contemporaine la société de l’incertitude. De quelle incertitude s’agit-il, à quels niveaux opère-t-elle (personnel, politique, institutionnel) et qu’entendons-nous par sécurité?

Nous comprenons ce terme comme la perception qu’une situation ne générera pas d’anxiété ni de peur, qu’elle ne causera pas de dommages: la sécurité en tant qu’absence de dangers. Le besoin de sécurité produit des normes sociales et juridiques qui visent à contrôler les lieux ou les sujets considérés comme dangereux. L’État devient le garant de ce qui est défini comme la «sécurité nationale».

Le concept de sécurité nationale a profondément changé au cours des dernières décennies, car il est lié à des contextes politiques et culturels. Ainsi, au cours des années des massacres d’État, les pouvoirs accordés aux forces de police sont renforcés. Aujourd’hui, ce sont le terrorisme islamique, le suprémacisme blanc, l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie, qui ramènent la guerre de territoire au cœur de l’Europe, soixante-dix ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale.

L’idée de sécurité est associée à la peur, à un ennemi extérieur, menaçant, différent de religion et de nationalité. Comme le souligne Fassin dans ses recherches sur la police française, le rôle de la police dans les banlieues parisiennes est celui d’une violence exercée contre les jeunes immigrés et les jeunes de deuxième (ou troisième) génération. Le monopole de la force, qui appartient à l’État, est délégué à la police pour préserver l’ordre et garantir la sécurité publique. La concentration de groupes sociaux appauvris, de sujets sur lesquels pèsent les préjugés, fait que les banlieues deviennent des poudrières, en France comme en Italie. Ainsi, l’État augmente la puissance des forces de l’ordre, qui arrêtent plus facilement les jeunes appartenant à ces catégories défavorisées, accentuant ainsi les dynamiques d’inégalité sociale [Fassin 2013].

Fassin lui-même, dans ses réflexions sur la «raison humanitaire», sur un «ethos compassionnel», montre comment les États acceptent le migrant en tant qu’objet de tortures, de brimades, de violences, et constate que les phénomènes migratoires oscillent entre sensibilité institutionnelle (compassion) et aspects de répression sociale [Fassin 2006; 2010].

Nombreuses sont les références aux analyses de Foucault sur le pouvoir et aux concepts d’«assujettissement» (on se soumet à une domination) et de «subjectivation», dans le sens où l’identité d’un individu est construite sur la base de sa position sociale. Il semble que la lecture «biopolitique» et l’«assujettissement» soient les clés à travers lesquelles les anthropologues lisent les pratiques coercitives mises en œuvre par les institutions envers les demandeurs d’asile.

Comme le souligne Vacchiano, il existe quatre types de dispositifs (au sens foucaldien) par lesquels les institutions établissent l’ensemble des «mesures qui, mises en place pour réguler la circulation des personnes, finissent par influencer la configuration des concepts d’appartenance, de droit, d’identité, de sécurité, de liberté, de justice, de citoyenneté». Ces dispositifs sont liés à quatre stratégies:

Les opérations de nature législative (traités et directives européens, lois nationales sur la condition des étrangers, sur la protection des mineurs migrants, sur le droit d’asile, etc.); les procédures administratives (règlements, programmes, instructions et financements associés); les mesures de type sécuritaire (patrouilles, réseaux, murs, centres de détention et camps de réfugiés, procédures biométriques et surveillance au sens général); mais aussi tout l’appareil conceptuel qui rend «évidente» la structure organisationnelle et politique de la citoyenneté contemporaine et de ses diverses déclinaisons - catégories, définitions, productions sémantiques et rhétoriques [Vacchiano 2011, 190].

Ainsi, c’est l’appareil législatif et administratif lui-même qui, par le biais de procédures, d’actes administratifs, de circulaires et de mesures à caractère sécuritaire, crée l’image du migrant «clandestin», du «faux réfugié qui veut obtenir une protection humanitaire», du demandeur qui met à mal le système de protection sociale. Pour décourager les parcours d’insertion, les institutions demandent différents types de documentation, véritables «artefacts bureaucratiques» [Riles 2006]. Des mois se passent en attendant la production de documents: titres de séjour, actes de naissance, certificats d’études, visas, procès-verbaux, certificats médicaux. Les certificats de santé sont particulièrement requis lorsqu’il s’agit de «documenter» la violence, le viol et la torture. Celles-ci deviennent fondamentales pour démontrer la fiabilité des récits personnels et intimes, pour obtenir la Protection Internationale, lors de l’audition des Commissions Territoriales (certificats médicaux, rapports psychiatriques) [Giudici 2014; Cabot 2012]. Dans les procédures de demande d’asile, il y a des histoires de violence de genre, qui sont «traduites» dans les langues juridiques et sanitaires des institutions, afin qu’elles puissent être vérifiées par les commissions territoriales. Comme l’affirme Taliani, les institutions produisent les victimes, mais les femmes elles-mêmes se proposent comme victimes pour obtenir l’asile [Taliani 2011; Pinelli 2011; Giudici 2016].

L’aspect le plus envahissant et le plus contraignant du langage est celui des circulaires administratives, dans lesquelles le niveau généralisé de discrimination institutionnelle est le plus manifeste. Les circulaires sont largement utilisées par les municipalités et les organismes publics en raison du caractère «d’urgence» attribué aux phénomènes migratoires, à tel point qu’elles sont considérées comme des sources de droit objectif, puisqu’elles sont liées au pouvoir des actes administratifs [Bucci 2005]. Aujourd’hui, les politiques migratoires se déduisent davantage des circulaires administratives que des lois et décrets-lois nationaux, la condition juridique et sociale des migrants en dépend donc souvent. Elles mettent en évidence le pouvoir exercé par les autorités administratives locales7. Comme le souligne Gjergji [2010], on peut situer ces circulaires dans une «zone frontière» entre le droit existant et les pratiques administratives, dans une sorte d’infra-droit administratif ou de droit interstitiel, produit par l’administration publique.

Les politiques migratoires actuelles en Italie s’expriment essentiellement par des circulaires administratives, c’est-à-dire par un droit interstitiel. Cela souligne, tout d’abord, également dans le domaine du droit, la volonté des institutions de ne pas conférer la pleine subjectivité juridique aux immigrés, et soulève en outre de sérieuses questions sur l’organisation actuelle du pouvoir, sur l’utilisation de formes paranormatives dans son exercice et, de manière générale, sur le processus de transformation de l’État, qui est loin d’abandonner [...] ses fonctions de gouvernement et de contrôle [Gjergji 2010, 444].

Si la méthode du contrôle et de la répression est celle que les citoyens attendent de la police, c’est parce qu’on continue à associer immigration et insécurité, sans prendre en considération le fait que la disparité sociale est en elle-même une source de conflit et de marginalisation. La question sociale est confiée à la police plutôt qu’à la politique, et elle est devenue une question raciale.

L’insécurité de la vie urbaine est liée à la peur de perdre son emploi, de perdre son statut social et économique, de faire l’objet de violences. Et l’étranger qui envahit l’espace public avec sa différence somatique (noir, jeune, actif) incarne en lui les peurs d’une différence menaçante et présente. L’homme noir semble réactiver d’anciens préjugés raciaux, les souvenirs coloniaux de l’esclavage, la puissance d’une sexualité exubérante et agressive.

Parler des banlieues urbaines, c’est parler du développement de la petite délinquance dont les immigrés non intégrés au tissu social sont souvent les protagonistes. Ce sont ces phénomènes visibles et inquiétants qui déterminent le rejet des étrangers par les Italiens. La non-inclusion sociale détermine des formes de «danger social»: il est donc dans l’intérêt des migrants comme des natifs que l’État mette en œuvre des politiques de travail sérieuses, en particulier pour les personnes marginalisées (italiennes et étrangères).

Bauman fait observer que les «étrangers» deviennent un problème lorsque leur visibilité dans l’arène urbaine brouille les lignes de démarcation (nous/les autres) qui devraient au contraire être visibles, car les frontières de la différence doivent être claires. Notre identité semble être menacée par cette présence, qui la «pollue». Bauman [1999] (mais aussi Appadurai 2017, 2014 et Remotti 2012) parlent d’identité, et se réfèrent à la division de Mary Douglas entre « pureté et danger », pour souligner que l’autre est le sale, l’impur, le danger, qu’il représente la «viscosité» (terme emprunté à Sartre), quelque chose qui envahit et rend le mouvement difficile, comme le goudron ou le miel, et nous fait penser que nous avons perdu notre liberté [Bauman 1999, 68-69]. La liberté est un concept relationnel, et c’est une relation de pouvoir: la liberté dépend de celui qui est le plus fort, des ressources matérielles et politiques dont l’un dispose par rapport à l’autre, en termes de classe et de ressources.

Appadurai, dans un texte qui se penche sur les insécurités de la société contemporaine, souligne comment le «corps ethnique peut devenir le lieu où il est possible de représenter et de rencontrer cette forme spécifique d’incertitude due à la mondialisation» [Appadurai 2017, 38]. La violence institutionnelle ne concerne pas seulement la sphère des droits, mais implique le corps de l’autre, celle le définit comme un corps qui peut être apostrophé - «sale nègre» - ou insulté à travers un processus d’animalisation - «tu penses comme un singe», «cette femme est une tique» (en référence à une travailleuse d’une ONG).

Appadurai se demande pourquoi les majorités devraient rabaisser ou attaquer les minorités, les plus faibles: le contraste identitaire, les stéréotypes, l’animalisation, servent à délimiter les frontières, les appartenances, à rétablir les différences. Les identités sociales, qui à tort ou à raison se sentent menacées par les minorités, et mettent en marche «une représentation de soi en tant que majorité menacée» [Appadurai 2017, 139]. La représentation de soi en tant que majorité menacée a besoin de slogans, «invasion de clandestins», «remplacement ethnique», «instrumentalisation de la protection sociale par les immigrés», ce qui rend légitime l’affirmation «les Italiens d’abord». Pour ce faire, il est nécessaire d’invoquer une «identité ethnico-nationale» prétendue et immuable, de se percevoir comme une majorité numérique qui cultive «l’illusion de la pureté et de la totalité nationale» [Ibidem, 141]. C’est pourquoi les groupes majoritaires (souveraineté blanche) ont souvent recours à des arguments démographiques et aux taux de fécondité pour désigner la minorité étrangère comme une cible à atteindre et retrouver leur identité perdue. Pour ne pas garantir aux étrangers les mêmes droits (civils, sociaux, politiques) qui sont pourtant les fondements des démocraties occidentales et de la «Charte des droits de l’homme» (1948), les majorités menacées auto-proclamées mettent en œuvre des stratégies juridiques complexes, des procédures différenciées, des obstacles à cette demande de citoyenneté sociale et politique qui met en évidence des corps soumis à des protections, des restrictions, bien que dans le giron d’un droit égalitaire apparent.

Les États nationaux ont dû faire face à une double pression: celle d’«ouvrir» les marchés aux investissements, biens et images venant de l’extérieur; et la pression pour gérer les capacités des minorités culturelles nationales à utiliser le langage mondialisé des droits de l’homme pour soutenir leurs demandes de respect et de reconnaissance culturels. Cette double pression a suscité dans de nombreux pays une perception critique des frontières nationales, de la souveraineté et de la pureté de l’ethnie nationale, et est directement responsable de la croissance des racismes majoritaires […] Les minorités dans un monde globalisé sont un évocateur constant de «l’incomplétude de pureté nationale» [Appadurai 2017, 153-171].

La question de la pureté renvoie ici aussi directement aux réflexions de Mary Douglas sur Pureté et danger, qu’Appadurai cite expressément pour montrer comment la minorité remet en question l’incomplétude de la pureté nationale. Les taxonomies morales et sociales prennent en compte d’autres éléments qui enfreignent les frontières, ces frontières qui divisent nous/eux, dedans/dehors, pur/impur, propre/sale, et exacerbent les craintes de la fin de la cohérence culturelle de la nation.

L’«angoisse d’incomplétude» (la pureté nationale) tend à mettre en marche les «instances purificatrices», en imposant des obstacles juridiques et normatifs aux minorités, en accentuant les caractéristiques (somatiques, religieuses, culturelles) de leur corps racisés afin de rendre de plus en plus lointaines et difficiles l’égalité des droits et la pleine citoyenneté. Ainsi, l’État moderne, laïc et démocratique produit l’idée qu’il existe des propriétaires légitimes de la nation, qui ont naturellement le droit d’accéder à la jouissance de la chose publique [Vereni, in Appadurai 2017, 176].

La pensée classificatoire crée des frontières, sépare et rend les différences absolues, ce qui en fait des essences et non des dynamiques socio-historiques. Elle souligne le danger d’un relativisme excessif, qui essentialise les cultures et fait disparaître les sujets, leurs histoires [Aime 2004, 53-54].

La pandemie de Covid-19

La pandémie de Covid-19 a mis à rude épreuve tant les parcours des migrants que les formes d’accueil: restrictions aux entrées, fermeture des frontières et contrôles sanitaires ont été des éléments clés pendant deux ans. Avec le décret-loi Cura Italia du 17 mars 2020 (loi n°18), de nouvelles mesures ont été introduites sur l’accueil et la protection sanitaire des migrants afin de favoriser la distanciation sociale et éviter la surpopulation des structures d’accueil. Pendant le confinement (avril-mai 2020), la réalisation des projets du fonds FAMI géré par le ministère de l’Intérieur, tels que les cours d’italien ou les activités de formation, mis en œuvre à travers la DAD (enseignement à distance), a également ralenti [Tuminelli 2021, 183, 185]. La fermeture de l’espace Schengen a été décrétée et de nombreux pays ont fermé leurs frontières avec les pays voisins et imposé des contrôles sanitaires à la frontière.

Le blocage partiel des migrations a eu un impact économique dans plusieurs secteurs économiques, tels que l’agriculture et les filières alimentaires. Des pays comme l’Allemagne et l’Italie ont besoin de 300 à 400 000 travailleurs saisonniers (récolte des tomates, du tabac, des oranges). Pour faire face à l’urgence, le Royaume-Uni a organisé des vols charters extraordinaires depuis la Roumanie pour faire venir des travailleurs agricoles; l’Allemagne a autorisé l’entrée de travailleurs saisonniers en provenance de Roumanie et de Bulgarie. Cela n’a pas empêché la situation sanitaire d’aggraver les conditions de ces migrants, souvent sous-payés et sans contrat, contraints de vivre dans des conditions sanitaires déplorables; il en a été de même en Italie et dans les campagnes espagnoles [D’Angelo 2020, 68]. Cela a mis en lumière la contribution de ces travailleurs, mais aussi du personnel infirmier et médical étranger au Royaume-Uni (33,1%) et en Allemagne (20%) et des auxiliaires de vie pour personnes âgées en Allemagne et en Italie [D’Angelo 2020, 69]. Sans pour autant améliorer les conditions sociales et la question des droits, bien que la Commission européenne ait lancé en juillet 2020 une consultation publique sur l’intégration sociale des communautés immigrées, et notamment l’accès aux soins de santé, au logement, à l’éducation et à l’emploi [Ibidem,70].

Les effets économiques de la pandémie ont été dévastateurs: en Italie, il est devenu évident que la population immigrée a été exposée aux processus d’appauvrissement, à tel point qu’en juillet 2021, le président de l’ISTAT, G. Carlo Blangiardi, a présenté à la Commission XI du Parlement (Emploi public et privé) le rapport sur la pauvreté en Italie, en soulignant que «pour les ménages comptant au moins un étranger, l’incidence de la pauvreté absolue est de 25,3% (+3,3 points par rapport à 2019), tandis que pour les ménages composés exclusivement d’étrangers, elle est de 26,7% (+2,3 points); elle est en revanche de 6,0% pour les ménages composés uniquement d’Italiens» [Paletti 2021, 201].

Les données montrent que la pauvreté augmente lorsqu’il y a des mineurs dans les ménages étrangers: dans ce cas, le pourcentage des ménages composés exclusivement d’étrangers en état de pauvreté absolue monte à 31,2%. Pour ce qui est de la composante féminine de l’immigration, les données sur l’emploi nous apprennent que «parmi les 159.000 emplois perdus par des étrangers en 2020, ce qui correspond à plus d’un tiers de ceux qui se sont évaporés au cours de l’année de la pandémie, 69% concernaient des femmes» [Paletti 2021, 203]. Il est évident que la pandémie, avec l’impact que l’urgence sanitaire a eu au plan social et économique, a creusé les inégalités entre les Italiens et les étrangers (en raison de la fragilité de l’emploi des migrants, qui sont souvent employés dans ce que l’on appelle «l’économie souterraine»), et a creusé l’écart concernant l’emploi des femmes.

Les données de l’ISTAT montrent également que sur 101.000 salariés en moins, 99.000 sont des femmes. Pour ce qui est de l’ensemble de l’année, sur 444.000 personnes qui ont perdu leur emploi, 312.000 sont des femmes. Le taux d’emploi des femmes en Italie est tombé à 48,5%, alors que la moyenne européenne est de 62,7%. Une voix influente qui s’est élevée pour diffuser ces données alarmantes est celle de Linda Laura Sabbadini, directrice centrale de l’ISTAT, l’une des fondatrices de Donne per la salvezza - Half of it et présidente du W20 (Women 20, groupe de travail international sur l’autonomisation des femmes qui accompagne le G20). Elle œuvre afin que le plan de relance comprenne des actions visant à développer l’emploi des femmes et à les soulager de la charge des soins familiaux.

Ainsi, être femme et étrangère (on parle de double discrimination, de croisement entre sexisme et racisme) aggrave la situation professionnelle, et la pandémie n’a fait que rendre cette situation encore plus manifeste. Il semble donc nécessaire, lorsqu’on parle d’inégalités sociales, de souligner l’urgence qui touche les communautés migrantes et les femmes. La présence de plus en plus massive de femmes et d’enfants ukrainiens qui arrivent en Italie et dans le reste de l’Europe depuis des mois, nous oblige à réfléchir à la manière dont la guerre modifie le flux des migrations, notamment en termes de genre. L’Italie compte une grande communauté d’Ukrainiens dans l’Europe occidentale, ce qui rend possible l’accueil et l’intégration des nombreuses familles matrifocales qui demandent à être accueillies et intégrées sur nos territoires. Les aspects dont on parle rarement sont les formes d’exploitation par le travail auxquelles sont soumises les femmes migrantes dans l’agriculture, en Italie et en Espagne. Des enquêtes et des articles de presse décrivent comment les ouvrières étrangères, en plus de travailler, sont également victimes de harcèlement sexuel et de violence verbale et physique [Prandi 2018]. Il semble donc nécessaire continuer une réflexion sur les migrations à la dimension du genre, d’examiner les formes de racisme et de sexisme dans la société contemporaine et de comprendre le rôle des anthropologues (hommes et femmes) dans ce climat social et politique8.

Le besoin d’une anthropologie publique apparaît urgent, une anthropologie capable d’analyser la complexité sociale et culturelle de nos sociétés, et de servir de référence aux institutions politiques, religieuses et sociales, en matière de migration et d’inclusion sociale. S’il fut un temps où le rôle des anthropologues était de sortir de l’Europe pour connaître d’autres communautés et en saisir les particularités et les compétences, aujourd’hui que le monde habite nos rues et nos villes, nous pouvons et nous devons être non seulement les spécialistes de la «diversité culturelle», mais aussi les analystes d’un monde en mutation, où le métissage est de plus en plus le terrain où sont mises à l’épreuve nos compétences disciplinaires et historiques, dans un dialogue permanent avec les institutions politiques, afin que les inégalités et le manque de dialogue avec les communautés étrangères ne deviennent pas la marque négative et conflictuelle de la post-modernité.

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1 Pensons que rien qu’en Italie, quelques 104 nationalités différentes sont représentées parmi les personnes qui arrivent par le canal de Sicile (par la mer) et par les routes des Balkans, jusqu’à Gorizia et Trieste.

2 Ce refus a été motivé par le fait que ces migrants sont africains, arabes ou du Moyen-Orient, donc souvent de religion islamique et appartenant à des cultures et traditions très différentes de celles de l’Europe. Au nom d’une prétendue «identité nationale», qui est idéologique, ces nations ont de facto délégué à l’Allemagne, à la France, à l’Espagne et à l’Italie le soin de gérer la présence de petites ou grandes communautés provenant de contextes très éloignés, y compris sur le plan culturel. Il y a environ 8 millions de réfugiés ukrainiens, dont 1,5 en Pologne, un million en Allemagne et 173. 645 en Italie. De 2014 à 2022, 2,5 millions de réfugiés et de migrants sont arrivés en Europe en provenance de pays non européens. En Italie, les débarquements en 2022 étaient de 105.000, en 2023 ils sont actuellement de 41.800.

3 Il existe de nombreuses publications, qui ne peuvent pas être passées en revue ici. Parmi les textes généraux, voir: Ong 2005; Sorgoni, 2011; Riccio, 2014; Costantini-Massa-Yazdani, 2016; Ferrari-Mugnaini, 2019.

4 En Italie, il existe une forme extrêmement modérée du ius soli, réglementée par la loi n°91 du 02.05.1992. L’article 4, alinéa 2, stipule: “Un étranger né en Italie peut devenir citoyen italien à condition d’y avoir résidé légalement et de manière continue jusqu’à sa majorité et de déclarer, dans l’année qui suit sa majorité, vouloir acheter Citoyenneté italienne”.

5 Rappelons que la Communauté européenne s’est dotée d’instruments réglementaires pour lutter contre la discrimination entre citoyens et immigrés. Le Conseil de l’Europe, depuis 1950 a adopté la “Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales” (CEDH). En 2000, le Conseil de l’Europe, avec la directive 43 (29 juin 2000) met en œuvre le principe de l’égalité de traitement entre les personnes, sans distinction de race et d’origine ethnique (environnement de travail, éducation, soins de santé, services sociaux) [Commissione della Comunità Europea, Libro Verde 2004, 11]. L’Italie a transposé ces indications avec la loi 39/2002. Toujours en 2000, le Conseil de l’Europe a publié une autre directive (78/2000) qui traite de la discrimination sur le lieu de travail et de la formation professionnelle, des questions liées aux disparités entre les sexes, aux orientations sexuelles, aux différences religieuses [Commissione della Comunità Europea 2004, 12].

6 Les communications importantes, dans le laboratoire, sont traduites en plusieurs langues (français, italien, arabe, farsi, ourdou), mais le contact physique et les câlins comptent plus que les mots, donnant vie à une proxémique, qui part de la manière de percevoir la distance et la proximité, le corps et le toucher. Le contact physique devient un signe de disponibilité à l’autre, d’ouverture, dans une relation parfois limitée par des difficultés linguistiques. Le sens d’une identité retrouvée émerge dans les propos des participants: Gurgen rappelle que le laboratoire a été le premier lieu où il a été appelé par son vrai nom et non par son nom italien, Ibrhaim dit qu’il se sent chez lui, après un long moment en voyageant. Dans l’espace du laboratoire, il est possible de trouver des morceaux d’identité qui nous ont été enlevés, que nous avons oubliés, dans un lieu liminal, l’identité subit un processus d’expansion et de confusion des frontières, ce qui la rend plus flexible. Les croyances sur notre identité changent, ainsi que celles sur les autres, rendant plus perméable la ligne de démarcation entre nous et les autres [De Grisogono 2015, 152].

7 Il est fait référence aux Pactes territoriaux pour la sécurité (des accords de collaboration et de solidarité stipulés entre l’Etat et les collectivités territoriales qui prévoient la promotion d’interventions) mis en œuvre par certaines municipalités et organismes publics italiens, tels que : ordonnances municipales contre les nettoyeurs de vitres, ordonnances contre les mendiants, interdiction d’enregistrer les migrants pauvres, interdiction de construire des centres islamiques, recours à la police à les frontières.

8 Pendant des années, les anthropologues italiennes ont été confrontés aux formes de discrimination dont souffrent les femmes immigrées, discutant de l’intersection entre sexisme et racisme. La place manque ici pour ouvrir une réflexion sur le sujet. Ce sont des domaines dans lesquels des ethnographies précises ont été réalisées et des dimensions théoriques plus générales ont été produites. Pour une analyse des femmes migrantes, entre religion, droit et santé, voir: Fusaschi 2011; Simone 2012; Tarabusi 2014; Taliani 2019; Pinelli 2019; Quagliarello 2021; Giacalone 2021; Parisi 2023.